Un dîner au Clos des Sens est un éveil des papilles à chaque instant. Un hommage aux lacs de Savoie et à l’arc alpin qui ne laisse pas indifférent
On n’a pas forcément besoin de connaître l’histoire d’un restaurant pour l’apprécier. Mais cette maison sur les hauteurs d’Annecy-le-Vieux est indissociable de son fondateur, Laurent Petit et son épouse Martine. Ce sont eux qui ont créé l’endroit en 1992 et qui ont voulu ce cadre contemporain, ce salon-cheminée design, cette salle boisée aux murs à facettes, cette belle terrasse aux marronniers centenaires et ce remarquable jardin d’aromates. Ce sont eux aussi qui, dès 2015, ont abandonné la viande pour se focaliser sur une offre végétale et lacustre qui met à l’honneur le terroir voisin et les producteurs locaux. « Rien ne provient de plus loin que 100 kilomètres », nous averti le chef Franck Derouet, adjoint de Laurent Petit pendant onze ans et aujourd’hui aux manettes de l’établissement. En salle, Thomas Lorival veille au grain. Il propose aussi les accords avec les vins (tous biodynamiques ou nature), mais aussi parfois avec des propositions sans alcool. Tout au long du repas, les explications données par les serveurs et serveuses apportent des éclairages intéressants, notamment sur la provenance des produits.
Depuis 2019, Le Clos des Sens affiche trois étoiles au guide Michelin et l’étoile verte récompensant les démarches écologiques et durable est aussi épinglée depuis qu’elle existe. Tout ça est tout à fait mérité tant par le niveau gastronomique que par la démarche écologique.
Dès l’apéritif et les amuse-bouche, les saveurs explosent en bouche
Tout au long du repas:
– le pain au levain naturel
– poivre de sichuan du jardin
– huile de noix torréfiée
Envolée de champignons de Savoie
Un des plats signature de la maison créé en 2018.
Les copeaux de champignons fondent dans la bouche tellement ils sont fins. Au centre, un champignon entier, mariné avec des échalotes. En condiment à l’intérieur, une gelée champignon, champignon confit, vinaigre de champignon réduit.
Dans la tasse un bouillon de champignons dont se dégage un parfum des sous bois d’une profondeur et longueur en bouche incroyable.
Accompagné d’un verdese, vieux cépage local du Domaine Finot, complexe et un peu gras.
Entre l’écrevisse et la rose
Le crustacé est travaillé en tartare, frais et léger, assaisonné avec un vinaigre de rose. Une bisque puissante accompagne l’ensemble et est aussi transformée en tuiles.
Accompagné d’un Nosiola venu des Dolomite, travaillé avec une légère macération pour lui apporter un peu d’amertume et de densité. Domaine de Foradori.
Truite et consommé d’arrêtes grillées
Un plat léger en milieu de repas, la truite dans son plus simple appareil, juste colorée au chalumeau et pochée par ce bouillon dense et légèrement fumé, complété par des légumes taillés très finement. C’est réconfortant.
Accompagné d’une cuvée Vesta de chez Maxime Dancoine. Une appellation Chignin-Bergeron pas du tout classique, plus minéral.
L’intensité du fenouil
Le bulbe confit dans l’huile de fenouil, laqué au miel et citron. Une crème de fenouil, légèrement piquante et très enveloppante. Salade de fenouil cru et fleurs. C’est servi avec une brioche feuilletée aux graines de fenouil, ultra gourmande.
Accompagné d’un jus de fenouil (bulbe et branches), graines de fenouil et d’aneth, huile de fenouil. Un accord frais, qui ajoute une autre dimension du légume sans être redondant.
Entièreté d’une perche, jeu de sauces
L’arrête centrale a été remplacée par un condiment puissant au foie de perche et shiso. Trois sauces entremêlées: une sauce au sudachi (agrume japonais plutôt acide), une sauce à la mondeuse (côté vineux), et un jus de viande légèrement corsé. Profondeur extrême autour d’une chair raffinée et savoureuse.
Accompagné d’un Nebbiolo italien de la Valtellina, par Marc Ferrari. Élégant et délicat
Incroyable plateau de fromages uniquement de la région: les trois massifs voisins (Bauges, Aravis et Bornes) et de l’arc alpin, Suisse et Italie (Aoste): des tomes, du reblochon, du vacherin et des tas d’autres. Servis avec une salade d’herbes du jardin.
Accompagné d’un jus de myrtille sauvage et romarin. Dans l’idée d’un condiment comme une confiture pour aller avec le fromage.
Fleurs blanches, chèvre
Acacia et sureau avec un sorbet au chèvre frais. Excellente transition entre le salé et le sucré.
Tarte fine, chicorée maison
Racine d’endive torréfiée, meringue. Belle amertume, simplicité
Mignardises
Noix déclinée et poudre, palet glacé et crème
On termine comme on a commencé avec la sauge croquante et les herbes, cette fois avec un sirop pour de la sucrosité.
Ce fut un dîner magistral où chaque plat offre une belle longueur qu’on a envie de garder en bouche. L’ensemble est bien équilibré et joue sur des sens différents. Il y a du chaud et du froid; du croquant et du doux; du charnel et du moelleux, de l’acidité à l’amertume, des couleurs, des odeurs… Tout ça avec un sens aigu de l’hospitalité et du partage.
Le Clos des Sens
Photo d’en-tête: Matthieu Cellard
13 rue Jean Mermoz à Annecy-le-Vieux (France)
Tél. : +33 (0)4 50 23 07 90
closdessens.com