L’huile d’olive se taille une belle place dans les rayons et sur les tables, mais toutes ne se valent pas. Explications
Les spécialistes de l’alimentation ont établi une frontière virtuelle entre les régions où l’on utilise du beurre et celles où on préfère l’huile. C’est à peu près la même que celle qui distingue les buveurs de bière des buveurs de vin. Luxembourg figure très clairement au nord de cette ligne. Mais au pays du beurre et de la bière, l’huile d’olive est en train de se tailler une place de choix. Les nombreux habitants originaires du sud de cette frontière imaginaire n’y sont pas pour rien, la mode du régime dit crétois sans doute aussi et les bienfaits du produit pour la santé itou. La demande d’huile d’olive croît chaque année, même si son prix augmente également, notamment à cause des réductions de production. Ainsi l’Espagne, premier producteur au monde a produit seulement 620 000 tonnes d’huile d’olive pendant la récolte de 2022-23, contre 1,5 million de tonne l’année précédente. L’Italie et le Portugal, deux autres grands producteurs d’huile d’olive ont aussi été frappés par des sécheresses extrêmes. Si la tendance se maintient, le prix pourrait doubler d’ici la fin de l’année. Raison de plus pour apprendre à lire les étiquettes, déjouer les astuces de marketing et comprendre comment est fabriqué ce qu’il convient désormais de qualifier d’or vert.
Provenance L’écrasante majorité de la production d’huile d’olive (97 pour cent) provient du bassin méditerranéen. L’Espagne pourvoit à elle seule la moitié du marché mondial. La Tunisie a récemment mis en place un plan d’action pour développer le secteur oléicole et atteindre une production de 250 000 tonnes d’huile d’olive, à l’horizon 2035. La mention de la provenance est obligatoire sur l’étiquette des huiles commercialisées dans l’Union européenne. Elle indique à la fois l’origine des olives et le lieu de production de l’huile. Dans un rayon de supermarché, on s’apercevra bien vite que la plupart des produits proposés sont des mélanges d’huiles de diverses provenances reconnaissables à la mention «huile d’olive de l’Union européenne » ou même « assemblage d’huiles d’olives originaires de l’UE et non originaires de l’UE » (autant dire le monde entier !). À l’autre bout de l’échelle de qualité, on se tournera vers des produits bénéficiant d’une appellation d’origine contrôlée (AOC) ou protégée (AOP), qui garantit le lien entre le produit et son terroir (sol, climat, savoir-faire). On compte près d’une centaine d’appellations d’origine en Europe, dont 42 en Italie, 26 en Espagne et huit en France.
Variétés Il existe un bon millier de variétés d’olives cultivées dans le monde. Toutes ne se prêtent pas à la transformation en huile. Rares sont les flacons où la variété est indiquée car les assemblages sont courants. Quand une mention « mono-variété » en est faite, peut se fier aux Picual (Espagne), Leccino (Italie), Koroneiki (Grèce), Cobrançosa (Portugal) ou Aglandau (France). Bien évidemment, plus les soins apportés dans le verger seront de qualité, meilleur sera le résultat obtenu. Le moment de la récolte est aussi important. Les olives vertes sont en général récoltées en septembre-octobre, lorsque l’olive a atteint sa taille adulte, mais n’a pas encore commencé à mûrir. Les olives noires sont récoltées mûres, entre fin novembre et début mars. Le choix du moment de la récolte dépend de ses qualités gustatives que l’on veut développer. Les olives récoltées quelques jours avant leur pleine maturité, quand leur couleur est légèrement purpurine, c’est-à-dire qu’elle passe du vert au mauve sont les plus aromatiques et les plus riches en polyphénols. Au nez et en bouche, les sensations herbacées dominent. On peut y trouver des arômes d’artichaut, de poivron et de fruits verts. Les olives récoltées mûres et noires donnent des saveurs plus douces (peu ardentes et peu amères) et rondes en bouche, avec des arômes d’amande, de fruits rouges ou jaunes, de tilleul.
Fabrication Il existe deux manières d’obtenir l’huile des olives, par pressage ou par centrifugion. Les deux sont admises pour les huiles dites « vierges ». Pour celles-ci, un chauffage léger (45 degrés) est autorisé, ce qui permet d’extraire l’huile plus rapidement, et donc d’augmenter le rendement. L’huile vierge ne peut pas être coupée avec d’autres huiles et son taux d’acidité ne pas dépasser deux pour cent. D’une qualité supérieure, l’huile « vierge extra » (et non pas extra vierge, ce qui ne correspond à aucune règle et qui pourtant se lit sur certaines étiquettes) ne peut pas dépasser un taux d’acidité de 0,8 pour cent. La pâte d’olives, issue du broyage, ne peut pas être chauffée au-delà de 27 degrés. L’huile d’olive qui en est extraite conserve alors ses arômes et ses bienfaits nutritifs. À l’inverse, les huiles sans mention, mélangent l’huile vierge avec de l’huile raffinée. Ce traitement chimique gomme les acides gras libres, responsables d’une oxydation plus rapide de l’huile, mais en altère considérablement les qualités gustatives et nutritionnelles. Vu les écarts de prix, il n’est pas inutile d’acheter plusieurs huiles, l’une, basique, pour la cuisine, et une ou des autres, plus subtiles, pour les assaisonnements.
Contrairement au vin, l’huile d’olive vieillit mal car elle s’oxyde. Mieux vaut la consommer au cours de son année de production et dans les trois ou quatre mois après l’ouverture de la bouteille. On préférera un conditionnement opaque et une conservation à l’abri de la lumière pour garder ses bienfaits et son goût.
Initialement paru dans d’Lëtzebuerger Land du 11.08.2023