Niché dans une chapelle datant de 1224, Inari, le restaurant de Céline Pham sert une cuisine de goûts et de saveurs qui séduit autant qu’elle bouscule
Tout au nord de la Finlande, Inari est capitale de la culture samie. Mais la référence choisie par la cheffe Céline Pham n’est pas celle-là. Inari est la divinité shintoïste du riz et des céréales. Elle est aussi la gardienne des maisons. Clin d’œil et hommage aux racines vietnamiennes de la cheffe, mais aussi au terroir de la Camargue voisine dont la culture du riz fait la fierté de toute la région.
Avec cette double affinité, Céline Pham concocte une cuisine de produits qui fait la part belle à la Provence, twistée par des notes asiatiques. Tout cela avec une maîtrise du détail qui n’empêche pas une générosité voire un certain humour. Les assiettes laissent une grande place au végétal, avec des parfums subtiles, de associations originales, mais aussi beaucoup de goût, de punch, de peps.
De son cv plus que costaud, on retiendra que la cheffe a été baignée dans la cuisine vietnamienne de la famille observant mère et grand-mère concocter les plats, aidant aussi à « éplucher des kilos d’ail », relate-t-elle dans une interview. Après des études de médiation culturelle, elle bosse un temps dans l’industrie du disque, mais rattrapée par son envie de cuisiner, elle va faire ses classes à l’école Ferrandi. On la suit dans quelques unes des adresses parisiennes les plus pointues, Ze Kitchen Galerie, Septime, ou Saturne. Elle se lance en indépendante en 2014 et travaille en résidence chez Fulgurances ou au Tontine. Elle crée la première carte du Drum Café de la fondation Luma à Arles. Et finit par poser ses valises pour de bon dans la cité antique.
Avant de détailler le menu de ce 15 mai, on ajoutera que Céline Pham, en plus de défendre une cuisine plus juste et respectueuse du vivant, s’investit sur plusieurs sujets sociétaux, notamment, les violences sexistes en cuisine. Dans sa cuisine comme dans sa salle, elle est d’ailleurs essentiellement entourée de femmes: Agathe de Buretel, directrice de salle; Rafaëlle Emery, sommelière et Chloé Bovon, sous-cheffe.
C’est parti pour un menu qui transporte, qui dépote, qui fait voyager et qui donne envie d’y retourner.
En amuse-bouche:
Gyoza végétal, mayonnaise ume kosho (prune et piment): parfait équilibre du doux et du piquant
Tuiles de sarrasin, condiment anchois et basilic, fleurs de saison. Quand on a lu la liste des ingrédients et vu la photo, on sait que c’est bon!
Petits pois, artichauts barigoule, sauce aux herbes et cosses de petits pois, oseille: De la fraicheur, une légère amertume, et la sauce aux cosses qui secoue
Asperges blanches et vertes, sauce XO végétale, cacahuètes, citron caviar : toujours en plein dans la saison. La sauce XO est addictive, les cacahuètes ajoute croquant et suavité, et des herbes, toujours des herbes, pas du tout au hasard, chacun ayant un rôle dans cette assiette.
Filet de rouget, purée de courgettes et courgettes, fumet de poisson monté à la poutargue, huile d’ail des ours. S’il fallait une définition à une sauce parfaite, elle serait là. C’est à la fois réconfortant (il y a du beurre), ça secoue (l’ail des ours), et ça appelle l’évasion.
Bœuf, bouillon phở, tombée d’épinards, anguille fumée, citron vert, Sriracha de kalamansi: Parfaite fusion terre-mer et France-Vietnam. Le bouillon est profond, la Sriracha envoie du bois, l’anguille prend la place qui lui revient…
Tuiles et crème de riz noir, glace au riz blanc, riz soufflé, caramel de sureau, fraises Cléry. Les différents riz s’accordent entre eux et avec les fraises. La glace au riz en particulier est une bombe de goût.
Inari
16 Pl. Voltaire, Arles (France)
Tél.: +33 9 82 27 28 33
inari-arles.com