À la tête de l’orchestre comme de la cuisine, on trouve un chef qui mène sa troupe à la baguette, comme le pain emblématique des Français et le couvert asiatique. Le plan de travail de la cuisine est aussi appelé piano ; l’ensemble des casseroles, couvercles et poêles est bien nommé une batterie de cuisine, parfois en cuivre ; pour trancher finement, on se sert d’une mandoline, sans oublier le tournedos Rossini, la pêche Melba ou la poire Belle-Hélène… De la partition à l’assiette, il n’y a qu’un pas. Que franchissent allègrement une vingtaine de musiciens de l’Orchestre philharmonique du Luxembourg et autant de cuisiniers pour la réalisation d’un livre de recettes salées, sucrées et liquides. L’idée première était de valoriser la diversité culturelle de l’orchestre en demandant aux musiciens une recette ou un ingrédient lié à un aspect important de leur vie. Les chefs les ont retravaillés un peu ou beaucoup, en y apportant leur touche personnelle.
Les moments de préparation et de dégustation ont donné lieu à des échanges nourris que l’on peut lire au fil des pages, rédigées par le journaliste Luc Boentges et illustrées par le photographe Eric Engel. Le chef d’orchestre Gustavo Gimeno compare le peu d’ingrédients des spaghetti cacio e pepe du chef de cuisine Renato Favaro à une partition avec peu de notes « où il est plus difficile de trouver l’harmonie ». En préparant un suprême de volaille au vin jaune, Léa Linster et Olivier Kauffmann parlent de leurs instruments fétiche respectifs : une poêle cabossée pour elle, un alto réparé pour lui. Le jeune clarinettiste Arthur Stockel devise sur l’équilibre et les émotions avec le spécialiste du végétal, René Mathieu et ses carottes confites avec gnocchi de polenta. Pour Attila Keresztesi et Cyril Molard, il est question du lien entre la main et l’esprit, alors que la biche des Ardennes est au four. Autour des Knödel inspirés par sa grand-mère, Benjamin Schäfer et Clovis Degrave plaisantent sur la «sexytude » des dressages et des percussions. Pour Jean-Emmanuel Grebet, passionné de pêche et de cueillette, il était important de puiser dans le terroir local. Thomas Murer l’épaule pour réaliser un dos de sandre aux asperges et au Riesling. La mousse au chocolat de la pâtissière Carole Lesquer ravive les souvenirs de Guillaume Lebowski…
À chaque recette, ses confidences et un choix musical en accord. Le livre Oui, Chef ! est paru aux éditions Schortgen en version française ou allemande au prix de 44 euros.
