Petit mais costaud : on y vient pour des assiettes à partager, on en recommande une fournée, on reste pour plus de vin nature… Ça se passe à Uzès et ça s’appelle Les Insolents
On est dans le sud et ça se sent : il fait encore pas loin de trente degrés à l’heure du dîner, il y a des platanes sur la terrasse, les cigales lancent le grésillement permanent et les accents chantent. Uzès est une bourgade bourgeoise, ultra mignonne et préservée. Le samedi midi, le marché attire du monde de toute la région. Le soir, on peut s’offrir une virée gourmande (à condition de réserver). Ne pas se fier à la petite façade, ne pas croire que parce qu’il y a écrit « Buvette » on n’y fait que boire et suivre les conseils des habitués du coin (clin d’œil à Marine et Hadrien). S’attabler aux Insolents, c’est la promesse d’une soirée pleine de surprises et de saveurs.
Côté surprise, il y a d’abord la découverte du chef du moment. Car ici, pas de cador ambitieux dont le nom fait de l’ombre à l’établissement : les chefs sont invités pour une résidence de six semaines. Moins, ils n’ont pas le temps de transmettre leur identité, plus ils risquent de s’encroûter et de prendre la routine. Cette tendance à des engagements à court terme a déjà fait ses preuves au Chardon à Arles ou chez Fulgurances à Paris. Ça marche particulièrement bien dans des petits établissements, souvent axés sur le vin (souvent naturel) où cet arrangement coche toutes les cases. Les clients, toujours plus versatiles qui recherchent la nouveauté y trouve le parfum d’excitation de l’inconnu. Les chefs étanchent leur soif d’aventure et les patrons n’ont pas à satisfaire des caprices de stars.
Le Toulousain Nathan George et la Parisienne Kim Eberhard ont ouvert Les Insolents en 2019, après s’être rencontrés alors qu’ils travaillaient à La Cave des Papilles à Marseille. Le réseau des amateurs, connaisseurs, producteurs et distributeurs de vins naturels leur fournit généralement les contacts des chefs qu’ils embauchent. Une confiance mutuelle, un goût partagé, une philosophie commune garantissent que la sauce prenne.
Et la sauce a bien pris l’autre soir où Rémi Lieu s’est mis aux commandes de la cuisine pour ce début d’été. Fraîchement rentré d’un voyage dans sa famille au Vietnam, il joue volontiers une partition fusion qui va bien. En commençant par la figure imposée de la maison : la cervelle d’agneau. L’abat est toujours au menu quel que soit le chef. C’est sans doute l’aspect le plus « insolent » de la carte (on dirait bien le plus « couillu », mais ça ne se passe pas au même endroit). Cette fois, ça donne une cervelle d’agneau meunière fumée, sur un toast, citron fermenté un an et chimichurri viêt. C’est suave, ça fond dans la bouche, rien à voir avec les (mauvais) des brasseries parisienne où la cervelle était servie pochée, toute blanche.
Les autres assiettes sont aussi vives, aux parfums francs et aux textures fondantes.
Pour accompagner tout ça, on peut compter sur la vinothèque de Nathan. Toutes les couleurs sont de la partie, que du nature. Il tend le bras pour indiquer que c’est fait « là, juste à côté », il raconte jusqu’au prénom du vigneron et trouve des adjectifs imparables pour nous donner envie de rhabiller la gamine: ses vins sont forcément funky, à moins qu’ils ne groovent dans le verre.
Les Insolents
5 Bd Victor Hugo à Uzès (France)
+33 9 53 08 87 05